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Incredible India

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« Incredible India », slogan touristique du gouvernement, on le retrouve partout, des murs de l’aéroport aux tickets d’entrée des divers monuments (Taj Mahal, Fort rouge, etc.)… Et pourtant, ce n’est jamais dans les lieux où ces deux mots sont accolés que l’on en perçoit la véracité.

Il y a quelques semaines de cela, on a décidé de quitter Delhi pour un petit périple à Agra et à Fatehpur Sikri… Je me suis réjouie d’une façon inimaginable à l’idée de voir enfin la merveille des merveilles, celle dont les photos ont bercé mes songes, adouci mes yeux grâce au reflet de son marbre éclatant : le majestueux Taj Mahal !

Dès l’arrivée à Agra, le périple s’annonce éblouissant…

Le lever et le coucher de soleil passés aux côtés du symbole immaculé de l’amour porté par l’empereur Shah Jahan à sa défunte femme Mumtaz Mahal, le reste de la journée il n’est pas difficile d’oublier qui on est au milieu des palais de la dynastie Moghol : Akbar ? Jahangir ? Une sultane ? Une simple servante au service de la puissance et de la démesure humaine ? Un jeune prince héritier ?

Des palais de marbre blanc aux dentelles de pierre rouge qui s’abandonnent sur les rives de la Yamuna, l’imagination n’a plus de limites…

« Incredible India » en effet. Et je peux vous le dire, c’est au cours de ce voyage de quatre jours que j’ai vécu un des moments les plus inoubliables depuis que je suis en Inde. Mais une fois de plus, les surprises indiennes ne sont jamais là où on les attend. Celle-ci se situe à presque deux heures de bus du Taj Mahal, dans la cité impériale d’Akbar abandonnée depuis bien longtemps, Fatehpur Sikri…

A l’ombre des ruines des palais de sa majesté,

En contrebas de l’impressionnante Jama Masjid,

Imaginez. Une rue. Aussi étroite que poussiéreuse. La seule qui permette de traverser le village d’est en ouest. Bordée de petites échoppes et de vendeurs ambulants aux étalages de fortune. Je déambule, essayant de faire abstraction des dizaines de « hello » ou « please Ma’ame come » qui, lancés constamment par les vendeurs, résonnent dans mes oreilles en une sorte de brouhaha.

Un garçon, qui semble légèrement plus jeune que moi, cale le rythme de ses pas sur les miens, puis me pose la question type dédiée aux touristes : « What country ? ». Je lui réponds en faisant mon possible pour ne pas laisser percevoir l’agacement qui me pique la gorge à force de devoir fournir la même réponse pour la quarantième fois de la journée. Une fois sa curiosité satisfaite, il ne s’en va pas, il continue d’essayer d’engager la conversation avec son anglais un peu maladroit. Celle-ci dévie rapidement sur les acteurs de Bollywood (ce n’est pas moi qui ai lancé le sujet cette fois, promis !)… Presque arrivés au bout de la rue, il me demande où je vais. Je ne le sais pas moi-même. Il me propose d’aller voir les anciennes fortifications qui sont à quelques mètres. Je jette un œil autour de nous et m’aperçoit qu’un véritable cortège nous accompagne dans la rue : plusieurs de ses amis l’ont rejoint, ainsi que la moitié des enfants du village qui se pressent derrière nous avec une curiosité qui leur écarquille les yeux. Certains nous escortent sur les murailles desquelles on domine la verdoyante campagne alentour. Les autres nous attendent au pied des grands escaliers en pierre rouge. Le garçon, qui se nomme Aakash, et son meilleur ami se mettent en tête du cortège tout en s’improvisant à la fois guides et ‘’security guards’’, ils me font visiter le village.

Puis, Aakash me prie de bien vouloir rencontrer sa famille. Je passe alors sous un petit porche en terre, monte un escalier et me retrouve sur une sorte de terrasse où le mobilier se limite à une télévision faisant face à une chaise en plastique. Un homme d’un âge respectable se lève, me serre la main en échangeant quelques mots puis m’invite à m’assoir sur le siège. Gênée, je ne sais quoi faire, être la seule assise ou refuser l’invitation ? Aakash me donne la possibilité de m’extirper de la situation. Sa mère ne se trouve pas ici, or c’est à elle qu’il voulait me présenter. On ressort et on entre dans la maison suivante. Et là, une flopée de femmes m’accueille, toutes les générations sont réunies : de la mère à la nièce d’à peine un an, en passant par les tantes, les sœurs, les belles-sœurs et les cousines… Elles m’entrainent dans la pièce principale, à la fois chambre et cuisine, et me font assoir sur le lit. Quelques instants plus tard, je tiens trois albums photos dans les mains. Une des sœurs du garçon me montre les moments marquants de la famille : le mariage de leurs deux frères, les photos des enfants, les poses prises devant le Taj Mahal, etc. Ils me demandent ensuite si j’ai un appareil photo et si je peux les prendre tous ensembles…

Le soleil est sur le point de décliner, il est temps de rentrer. On m’accompagne sur quelques mètres. On me fait promettre de revenir le lendemain, j’accepte avec plaisir. L’appel à la prière retentit. On m’indique la route jusqu’à l’hôtel. Des hommes en salwar kameez blanc nous dépassent d’un pas pressé. J’avance dans la même direction, bercée par l’Adhan, sourire aux lèvres…