Archives de Catégorie: All around India

Dharamsala, le Tibet en exil

Par défaut

Tissus de prières au vent, fascinantes maisons prêtes à basculer dans le vide, temples bouddhistes et photos du Dalai Lama disséminées un peu partout. Le décor est planté. 1600 mètres d’altitude, Dharamsala, le Tibet recréé entre deux sommets enneigés.

Temple de Dharamsala

Rappel historique

Il fut un jour où le Tibet était un pays libre et indépendant qui s’étendait sur un territoire équivalant aux deux-tiers de l’Inde. Il disposait de ses propres institutions politiques et religieuses, de sa propre monnaie, de sa propre armée… Bref, des différents attributs d’un Etat.

En 1949, la nouvelle République de Chine envahit le Tibet. L’armée tibétaine n’était en réalité pas très puissante et plia face à celle de son voisin. Les défaites successives aboutirent à la signature d’un traité qui annexa le Tibet à la Chine. La résistance armée de la population continua pendant plusieurs années, notamment sous la forme de guérillas, avant de se transformer en résistance pacifique.

Pendant que la répression de la Chine s’accentuait, celle-ci se lança également dans une campagne de destruction de la culture tibétaine. Sous couvert de la révolution culturelle chinoise (1966-76) le gouvernement commença à détruire le patrimoine tibétain : plus de 6000 temples et monastères furent démolis, d’importants transferts de population chinoise furent effectués vers la région du Tibet et les ressources naturelles furent exploitées à outrance (déforestation, tests nucléaires, etc.).

Bouddha du Namgyalma Temple
(temple construit en mémoire des Tibétains qui ont combattu pour un Tibet libre)

Recréer le Tibet

En 1959 la sécurité du Dalai Lama semble trop menacée pour qu’il puisse rester à Lhassa, (ancienne) capitale du Tibet. Il choisit donc l’exil vers l’Inde. Après avoir traversé une partie de l’Himalaya, il s’installe à Dharamsala, plus précisément dans la ville de Mac Leod Ganj.

A l’image du Dalai Lama, de nombreux Tibétains ont également trouvé refuge dans les pays frontaliers (Inde, Népal, Bhoutan…). Plusieurs villes sont donc devenues des espaces d’expression et de continuité de la culture tibétaine. Dharamsala, surnommée « petit Lhassa » est très certainement la plus emblématique de cette perpétuation culturelle.

A Dharamsala communautés tibétaine et indienne cohabitent
Ici, stand de "momos" (met typique tibétain) devant le Namgyalma Temple

Outre la construction de temples et de monastères, l’accent a été mis sur l’éducation avec la création d’écoles tibétaines afin que les enfants d’exilés continuent à apprendre leur langue, leur histoire et leurs coutumes.

Alphabet tibétain peint dans la cour d'une école primaire de Dharamsala
Crédit photo : Martine Salmon

L’art, quant à lui, se perpétue à travers des structures telles que le TIPA (Tibetan Institute of Performing Arts) qui forme des étudiants aux arts scéniques tibétains, tel que l’opéra, le chant et la danse. Chaque année, pendant une semaine des représentations d’opéra sont organisées dans l’enceinte du TIPA et j’ai eu la chance de me trouver à Dharamsala précisément à ce moment là. En dépit de la barrière linguistique qui ne permettait pas réellement de comprendre l’histoire, le spectacle était juste fascinant à regarder.

NB : Les informations historiques proviennent en grande partie du « Tibet Museum » de Dharamsala

De la mort à l’amour (3 : Khajuraho l’érotisme à l’état pur)

Par défaut

Khajuraho, petite ville du Mahya Pradesh à l’apparence paisible et innocente, cache plutôt bien son jeu. Sa position isolée lui a permis de préserver ses secrets. Entendez par là une dizaine de temples hindouistes aux sculptures pour le moins surprenantes. Construits entre le Xe et le XIIe siècle, ils font la part belle à la guerre et à l’amour, sous toutes ses formes et ses positions.

Une architecture travaillée et imposante…

… Qui ne révèle ses subtilités que lorsque l’on se rapproche  

Amour humain ou amour animalier, tous les coups semblent permis

Ces quelques photos ne sont qu’un infime échantillon de ce que l’on peut observer sur les murs de ces « temples du Kama-Sutra »… Et ces sculptures sont d’autant plus surprenantes lorsque l’on commence à connaitre la société indienne et ses tabous. Dans un pays où le sexe n’est pas encore un sujet que l’on évoque facilement, quelle impression étrange que de voir des familles entières ou des couples  contempler les bas-reliefs assez explicites. Surtout lorsque l’on est conscient que l’absence de relations sexuelles avant le mariage reste bien souvent la norme et que même si certains membres de la jeune génération s’affranchisse des interdits, leur famille n’en ait que rarement informée. En bref, les temples de Khajuraho sont une sorte de livre érotique à ciel ouvert pour les touristes curieux, mais surtout pour les Indiens qui, pour la grande majorité, n’ont jamais jeté un oeil au Kama-Sutra, l’ouvrage national pourtant le plus connu à l’étranger…

De la mort à l’amour (2 : Varanasi la vivante)

Par défaut

Enflammée par les crémations et traversée par le fleuve sacré qui transporte les morts vers la délivrance, Varanasi est pourtant l’antonyme d’une ville morte. Le temps semble parfois s’y être arrêté, pas pour y mourir, mais pour y apprécier chaque instant de vie…

La Vie Animale

La Vie Candide

La Vie Active

De la mort à l’amour (1 : Varanasi la sacrée)

Par défaut

Lever de soleil sur le Gange

Hasard ou tentative inconsciente de contrer le destin, d’expérimenter la mort pour mieux apprécier la saveur de la vie ? Quelle qu’en soit la raison, la ville des morts s’avère être la première étape de notre road trip de dix jours. Benaras, Varanasi ou Kashi, nommez-là comme bon vous semble mais faites en sorte qu’elle soit votre dernière demeure. Mourir dans la ville sacrée des Hindous permet d’atteindre le Moksha, la délivrance du cycle des réincarnations. La purification de l’âme est également possible pour ceux qui n’ont pas eu la chance de laisser échapper leur dernier souffle à Varanasi, il faut alors immerger les cendres du défunt dans le Gange au cours d’une brève cérémonie.

Flammes témoignant d'une crémation au bord du Gange (seule photo prise des crémations, car par respect pour les familles des défunts, c'est normalement interdit)

Mais plus que la cité des morts, Varanasi est un passage entre deux mondes, une ville de rites où les quatre éléments se donnent rendez-vous : du feu des crémations à la terre battue qui recouvre les escaliers des ghats juste après la mousson, de l’écoulement millénaire et imperturbable du Gange à la fumée des morts qui envahit les quartiers de la ville avant de se laisser entrainer par le vent vers des hauteurs imprenables. Cité des morts, ville animée, lieu sacré, haut lieu de pèlerinage mais aussi du tourisme ; les identités de Varanasi sont multiples, les descriptions nombreuses et infinies, et pourtant il est impossible de réellement la décrire. Il faut la vivre, la sentir, la respirer, la toucher, s’en imprégner. S’étonner du contraste entre le malaise ressenti en observant les corps bruler et la beauté des flammes qui, dans la nuit, se détachent des eaux sombres et moirées du Gange.  Apprendre à ne plus avoir peur de la mort, à la regarder en face et à en respirer les effluves. Puis, être fascinée par les corps des fidèles, emplis de vie, qui plongent matin et soir dans les eaux à la fois sacrées et polluées pour y trouver purification et salut.
Incontestablement, lieu multiple et insaisissable, Varanasi est la ville la plus magique et surprenante qu’il m’ait été donné de voir depuis mon arrivée en Inde.

Bain rituel après le lever du soleil

Meditation time

Bain rituel version masculine

Vendeur de fleurs dédiées aux offrandes à l'entrée du temple d'Anuman, le Dieu singe

Peu de temps avant le coucher du soleil, Sadhu qui achève sa baignade (un Sadhu est un sage hindou ayant renoncé à la vie familiale et à toute possession matérielle)

Après le coucher du soleil, des cérémonies ont lieu tous les soirs, face au Gange, pour rendre hommage au fleuve sacré

Salutation d'un groupe de Sadhus

Camel business in Jaisalmer

Par défaut

Sur les remparts du fort de Jaisalmer

Not far from the Pakistani border, Jaisalmer seems to emerge from the Thar Desert.
The ‘Golden city of India’ has nothing to envy to the surrounding desert: its walls have the colour of the sand and its buildings have prettier designs than the dunes.

Femmes dans une rue de Jaisalmer, à l'extérieur du fort

However the desert appears to be a prolific source of incomes for the area. Indeed, one of the most common businesses of the town is the organization of camel safaris in the desert. Many people have chosen this field to earn a living, eager to provide for their family, but also to make tourists discover their homeland traditions.

Chandra Ujjwal is one of them, for ten years he used for one of the biggest hotel of Jaisalmer. But given the way the camel safaris were organized there he decided to leave and to start a business more respectful of the desert. The travellers are brought to the most touristic dunes, crowded and polluted. These kinds of places, like Sam’s dunes, were originally breathtaking and deeply peaceful but for many years the natural environment has not been really respected. In fact garbage, toilet paper, bottles, etc. lay down in the sand, not being picked up by the cameleers or the tourists.

Parmi les rares personnes rencontrées, quelques bergers, notamment de jeunes enfants...

Moreover the shops selling food, drink and alcohol in the middle of the desert have contributed to destroy the landscape, according to Chandra and many touristic guides such as the world-known Lonely Planet.

In order to offer an alternative vision of the camel safaris he set up his own hotel two years ago. He organizes the trips in less known areas where the only people encountered are some villagers, shepherds or rare travellers. He also assures an eco-friendly trip with old-fashioned camp fire cooking.

Les repas sont préparés par les chameliers, directement dans les dunes, sur un feu de bois

Though this eco-friendly approach may appear as a progress, the social situation of the cameleers, including his, is closed from being appalling. Away from their family nine months out of twelve, these men live in poor conditions, obliged to stay with the camels in the desert.

Ali Khan et Mister Magou, un des chameaux du troupeau

Behind his young age, Ali Khan already bears a realistic view on his profession. The 300km between his job and his village, Bambara, is a high price to pay to provide for his family. But it is, according to him, the only solution: with no employment and mediocre infrastructure, his village has a long-time tradition of men exile.

Coucher de soleil sur les dunes

Text written by Camille Goyet and Maina Fauliot

Incredible India

Par défaut

« Incredible India », slogan touristique du gouvernement, on le retrouve partout, des murs de l’aéroport aux tickets d’entrée des divers monuments (Taj Mahal, Fort rouge, etc.)… Et pourtant, ce n’est jamais dans les lieux où ces deux mots sont accolés que l’on en perçoit la véracité.

Il y a quelques semaines de cela, on a décidé de quitter Delhi pour un petit périple à Agra et à Fatehpur Sikri… Je me suis réjouie d’une façon inimaginable à l’idée de voir enfin la merveille des merveilles, celle dont les photos ont bercé mes songes, adouci mes yeux grâce au reflet de son marbre éclatant : le majestueux Taj Mahal !

Dès l’arrivée à Agra, le périple s’annonce éblouissant…

Le lever et le coucher de soleil passés aux côtés du symbole immaculé de l’amour porté par l’empereur Shah Jahan à sa défunte femme Mumtaz Mahal, le reste de la journée il n’est pas difficile d’oublier qui on est au milieu des palais de la dynastie Moghol : Akbar ? Jahangir ? Une sultane ? Une simple servante au service de la puissance et de la démesure humaine ? Un jeune prince héritier ?

Des palais de marbre blanc aux dentelles de pierre rouge qui s’abandonnent sur les rives de la Yamuna, l’imagination n’a plus de limites…

« Incredible India » en effet. Et je peux vous le dire, c’est au cours de ce voyage de quatre jours que j’ai vécu un des moments les plus inoubliables depuis que je suis en Inde. Mais une fois de plus, les surprises indiennes ne sont jamais là où on les attend. Celle-ci se situe à presque deux heures de bus du Taj Mahal, dans la cité impériale d’Akbar abandonnée depuis bien longtemps, Fatehpur Sikri…

A l’ombre des ruines des palais de sa majesté,

En contrebas de l’impressionnante Jama Masjid,

Imaginez. Une rue. Aussi étroite que poussiéreuse. La seule qui permette de traverser le village d’est en ouest. Bordée de petites échoppes et de vendeurs ambulants aux étalages de fortune. Je déambule, essayant de faire abstraction des dizaines de « hello » ou « please Ma’ame come » qui, lancés constamment par les vendeurs, résonnent dans mes oreilles en une sorte de brouhaha.

Un garçon, qui semble légèrement plus jeune que moi, cale le rythme de ses pas sur les miens, puis me pose la question type dédiée aux touristes : « What country ? ». Je lui réponds en faisant mon possible pour ne pas laisser percevoir l’agacement qui me pique la gorge à force de devoir fournir la même réponse pour la quarantième fois de la journée. Une fois sa curiosité satisfaite, il ne s’en va pas, il continue d’essayer d’engager la conversation avec son anglais un peu maladroit. Celle-ci dévie rapidement sur les acteurs de Bollywood (ce n’est pas moi qui ai lancé le sujet cette fois, promis !)… Presque arrivés au bout de la rue, il me demande où je vais. Je ne le sais pas moi-même. Il me propose d’aller voir les anciennes fortifications qui sont à quelques mètres. Je jette un œil autour de nous et m’aperçoit qu’un véritable cortège nous accompagne dans la rue : plusieurs de ses amis l’ont rejoint, ainsi que la moitié des enfants du village qui se pressent derrière nous avec une curiosité qui leur écarquille les yeux. Certains nous escortent sur les murailles desquelles on domine la verdoyante campagne alentour. Les autres nous attendent au pied des grands escaliers en pierre rouge. Le garçon, qui se nomme Aakash, et son meilleur ami se mettent en tête du cortège tout en s’improvisant à la fois guides et ‘’security guards’’, ils me font visiter le village.

Puis, Aakash me prie de bien vouloir rencontrer sa famille. Je passe alors sous un petit porche en terre, monte un escalier et me retrouve sur une sorte de terrasse où le mobilier se limite à une télévision faisant face à une chaise en plastique. Un homme d’un âge respectable se lève, me serre la main en échangeant quelques mots puis m’invite à m’assoir sur le siège. Gênée, je ne sais quoi faire, être la seule assise ou refuser l’invitation ? Aakash me donne la possibilité de m’extirper de la situation. Sa mère ne se trouve pas ici, or c’est à elle qu’il voulait me présenter. On ressort et on entre dans la maison suivante. Et là, une flopée de femmes m’accueille, toutes les générations sont réunies : de la mère à la nièce d’à peine un an, en passant par les tantes, les sœurs, les belles-sœurs et les cousines… Elles m’entrainent dans la pièce principale, à la fois chambre et cuisine, et me font assoir sur le lit. Quelques instants plus tard, je tiens trois albums photos dans les mains. Une des sœurs du garçon me montre les moments marquants de la famille : le mariage de leurs deux frères, les photos des enfants, les poses prises devant le Taj Mahal, etc. Ils me demandent ensuite si j’ai un appareil photo et si je peux les prendre tous ensembles…

Le soleil est sur le point de décliner, il est temps de rentrer. On m’accompagne sur quelques mètres. On me fait promettre de revenir le lendemain, j’accepte avec plaisir. L’appel à la prière retentit. On m’indique la route jusqu’à l’hôtel. Des hommes en salwar kameez blanc nous dépassent d’un pas pressé. J’avance dans la même direction, bercée par l’Adhan, sourire aux lèvres…