Hasard ou tentative inconsciente de contrer le destin, d’expérimenter la mort pour mieux apprécier la saveur de la vie ? Quelle qu’en soit la raison, la ville des morts s’avère être la première étape de notre road trip de dix jours. Benaras, Varanasi ou Kashi, nommez-là comme bon vous semble mais faites en sorte qu’elle soit votre dernière demeure. Mourir dans la ville sacrée des Hindous permet d’atteindre le Moksha, la délivrance du cycle des réincarnations. La purification de l’âme est également possible pour ceux qui n’ont pas eu la chance de laisser échapper leur dernier souffle à Varanasi, il faut alors immerger les cendres du défunt dans le Gange au cours d’une brève cérémonie.
Flammes témoignant d'une crémation au bord du Gange (seule photo prise des crémations, car par respect pour les familles des défunts, c'est normalement interdit)
Mais plus que la cité des morts, Varanasi est un passage entre deux mondes, une ville de rites où les quatre éléments se donnent rendez-vous : du feu des crémations à la terre battue qui recouvre les escaliers des ghats juste après la mousson, de l’écoulement millénaire et imperturbable du Gange à la fumée des morts qui envahit les quartiers de la ville avant de se laisser entrainer par le vent vers des hauteurs imprenables. Cité des morts, ville animée, lieu sacré, haut lieu de pèlerinage mais aussi du tourisme ; les identités de Varanasi sont multiples, les descriptions nombreuses et infinies, et pourtant il est impossible de réellement la décrire. Il faut la vivre, la sentir, la respirer, la toucher, s’en imprégner. S’étonner du contraste entre le malaise ressenti en observant les corps bruler et la beauté des flammes qui, dans la nuit, se détachent des eaux sombres et moirées du Gange. Apprendre à ne plus avoir peur de la mort, à la regarder en face et à en respirer les effluves. Puis, être fascinée par les corps des fidèles, emplis de vie, qui plongent matin et soir dans les eaux à la fois sacrées et polluées pour y trouver purification et salut.
Incontestablement, lieu multiple et insaisissable, Varanasi est la ville la plus magique et surprenante qu’il m’ait été donné de voir depuis mon arrivée en Inde.
Bain rituel après le lever du soleil
Meditation time
Bain rituel version masculine
Vendeur de fleurs dédiées aux offrandes à l'entrée du temple d'Anuman, le Dieu singe
Peu de temps avant le coucher du soleil, Sadhu qui achève sa baignade (un Sadhu est un sage hindou ayant renoncé à la vie familiale et à toute possession matérielle)
Après le coucher du soleil, des cérémonies ont lieu tous les soirs, face au Gange, pour rendre hommage au fleuve sacré
Salutation d'un groupe de Sadhus